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vendredi 7 décembre 2012

Aya de Yopougon, joyeuse nostalgie ivoirienne

Le Comptoir de la BD 
07/12/2010, par Sébastien 

On ne peut pas lire le dernier tome de la formidable série Aya de Yopougon sans ressentir en toile de fond un sentiment amer que ce qui nous est raconté correspond peut-être à un temps de douceur et d'insouciance qui n'est pas prêt de revenir. L'étrange situation politique actuelle, la confrontation entre deux hommes politiques revendiquant tous deux le sommet de l'état, aura vraisemblablement du mal à trouver une issue sans que ne coule encore le sang, prolongeant de fait une décennie de dissensions fortes, profondes, durables, entre le nord du pays et sa région côtière dominée par la ville d'Abidjan. Je serai bien en peine de dire que je comprends réellement ce qui se passe là-bas, entendu que ce n'est qu'une succession de coups tordus, de déni de démocratie et qu'à part m'inquiéter du sort des ressortissants français et étrangers qui ont déjà fait l'objet de chantage, de menace, voire d'atteintes physiques par le passé, je ne peux que secouer la tête avec fatalisme. Ouattara ou Gbagbo ? 


Les urnes désignent sans contestation le premier, mais le second s'accroche à son pouvoir. J'écoutais avec attention ce dernier weekend les points de vue des ivoiriens interrogés à la radio sur la situation, et il m'était impossible de distinguer lequel des candidats était le bon, le gentil, et qui avait le costume du méchant. La question ivoirienne est vraisemblablement infiniment plus complexe que je l'imagine, entre ethnies, frontières floues, notions puantes d'ivoirité ressorties ponctuellement dans les discours vindicatifs... Ce que je comprends c'est que la démocratie comme on la conçoit par chez nous, pas plus là-bas qu'en Irak, ne va de soit.

A ce titre, la lecture d'Aya de Yopougon, si elle ne m'éclaire pas sur le fond, a l'immense mérite sur la forme de susciter de l'empathie envers les ivoiriens au travers des facéties qui leur sont prêtées et de l'universalité de leurs réactions, décrites dans un langage teinté d'expressions locales, dans un temps où le "Vieux" Houphouët-Boigny, père de l'indépendance du pays, régnait sur une jeune nation économiquement en pleine expansion. Sur les six albums que comptent les aventures d'Aya de Yopougon, il n'y a en réalité très peu d'allusions à la politique internationale du pays, sa perception par les grands de ce monde. Au contraire les deux auteurs, la scénariste Marguerite Abouet et le dessinateur Clément Oubrerie, nous offrent trois entrées sur autant de réalités concomitantes : celle des ivoiriens chez eux, dont Aya, qui constitue les fils principaux et ou se rejoignent les fils parallèles ; celle d'un ivoirien revenant de France et essayant de tirer profit du mirage français qu'il rapporte avec lui ; et celle d'un ivoirien, naïf mais débrouillard, parti y chercher le grand amour. La Aya qui donne son nom à la série est une jeune femme un peu farouche, grande panthère délicate, intelligente et adepte du bon sens, soutenue par deux copines à l'amitié indéfectible, que l'on voit réunies sur la couverture ci-contre. D'emblée, les hommes ne trouvent guère grâce aux yeux du trio, et il faut dire que la scénariste dépeigne des hommes finalement très peu à leur avantage, bien pâles face à des femmes beaucoup plus sensées et équilibrées que leurs frères, maris ou amants. 

Ce que nous dit Aya de Yopougon de la Côte d'Ivoire d'alors (il y a trente ans, à la louche), c'est que ce sont les femmes qui tiennent l'équilibre même précaire du quotidien, bien qu'elles n'apparaissent pas dans des postes à responsabilité. Elles influencent et rectifient les avis des hommes, savent comment leur faire tourner la tête tout comme les faire marcher à peu près droit. Sous la chaleur moite du quartier populaire de Yopougon, immense zone bigarrée dans le nord d'Abidjan, épouses, filles ou grands-mères donnent le la, recadrent constamment les hommes nostalgiques de leur gloire et de leur virilité passées, lesquels se compromettent facilement à des jugements à l'emporte-pièce dans leur maquis (restaurant) préféré. Bien souvent, c'est l'inconstance ou la bêtise des hommes (quand ce n'est pas plus grave, comme la violence sexuelle du professeur d'Aya, retors et malsain) qui provoquent les évènements et bouleversent la vie des uns et des autres. 

Parce qu'ils sont avant tout conteurs et non ethnologues, les deux auteurs tiennent aussi à nous amuser et nous émouvoir en nous faisant découvrir une Afrique certes pauvre au regard de notre opulence d'occidental surconsommateur, mais où l'esprit de clocher se met au diapason avec le souci constant, sincère et indestructible de la communauté. Face à cette Afrique là, notre imbécillité quotidienne d'européen qui consiste, jusqu'au plus haut de l'état, à considérer les Africains comme des assistés bons uniquement qu'à vouloir copier le modèle de vie des français, est passée au révélateur d'un peuple qui s'avère peut-être infiniment plus juste, tendre, humain, simple que notre société riche, individualiste et finalement désorientée. Dans ce sens, la situation politique actuelle, confuse, indécise, est-elle le produit d'une Afrique déraisonnable ou d'une ambition inspirée par l'Occident, inadaptée et rapace ? Je n'ai évidemment pas la réponse et je me garderai d'en suggérer une (ma liberté de penser...) mais en revanche, ce qui me rassure en lisant Aya, c'est que la couleur de peau et le fait de vivre sur un autre continent n'y changent rien : une bonne histoire reste une bonne histoire et Aya de Yopougon nous donne à réfléchir autant qu'à nous divertir intelligemment, et cela, ça n'a pas de prix. Pour conclure, le site de Clément Oubrerie vaut très largement le détour, notamment pour ses illustrations pour Aya, mais pas seulement... Sans parler du film qu'il supervise, adapté de, dont je vous parlerai tantôt. 
Sébastien NAECO 

(illustrations : couverture et extrait du tome 6, dernier, d'Aya de Yopougon, par Marguerite Abouet et Clément Oubrerie, collection Bayou éditions Gallimard)

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