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samedi 9 mars 2013

"Les Rois du Paradis"

de Mark Behr

Le Monde des Livres
08/03/2013
Catherine Simon


Il est fort, Mark Behr. Si l'on n'y prenait garde, on pourrait ne voir, dans cette histoire d'un fils qui revient au pays pour enterrer sa mère, que le énième roman, teinté de nostalgie, d'un auteur parmi d'autres, traitant d'un sujet mille fois rebattu. Sauf que l'histoire se passe au fin fond du veld, la campagne d'Afrique du Sud. Et que le fils en question, Michiel, jeune Afrikaner de bonne famille, chassé de l'armée sud-africaine après avoir été surpris en train de batifoler avec un "officier de couleur", a refait sa vie aux Etats-Unis, avec un gay de San Francisco. Un cocktail explosif, qui donne à ce livre, à la charpente subtile et au style fluide et sobre, une puissance détonante. 


Censée, depuis les années 1990 et le triomphe de Nelson Mandela, incarner la "nation arc-en-ciel", l'Afrique du Sud reste marquée au fer rouge par son histoire - celle des guerres de conquête et de l'apartheid. La confrontation avec ces pages sombres du passé, longtemps censurées, refoulées et encore largement méconnues, est devenue une obsession des romanciers sud-africains, comme le rappelle l'ouvrage collectif "Afrique du Sud. Une traversée littéraire" (Institut français-Philippe Rey-INA, 2011). 
Mark Behr, né en 1963 en Afrique du Sud, où il a passé sa jeunesse, n'échappe pas à la règle. Dans son premier roman, "L'Odeur des pommes" (JC Lattès, 2010), on suivait la descente en enfer d'un enfant, le petit Marnus Erasmus, vivant sous l'emprise de son officier de père et peu à peu séduit par l'idéologie viriliste des tenants d'une Afrique du Sud blanche et "pure". L'enfer de Marnus se situait dans les années 1970, dans la ville du Cap, et s'achevait en pleine guerre d'Angola. 

LE BONHEUR N'EST QU'UN VOEU 
Avec "Les Rois du Paradis", nous voici en rase campagne, au milieu des collines de l'Etat libre d'Orange, berceau historique des Boers. S'il y a une majuscule à Paradis, c'est parce que la ferme des parents, Dawid et Beth Steyn, a été baptisée ainsi. Quatre chênes centenaires se dressent à l'entrée. En poussant, ils ont défoncé la vieille grille de fer forgé. "Un Anglais, un dénommé Horwood, avait eu le domaine pour six pence. Quand la ferme fut rendue aux Afrikaners, le premier Oubaas Steyn s'empressa d'effacer la graphie anglaise", explique le narrateur. Exit "The Paradise", vive "Le Paradis" ! Quelle que soit la manière d'écrire, le bonheur n'est souvent qu'un voeu. "On raconte dans la famille (...) que les quatre chênes avaient été plantés pendant la guerre des Boers par le dernier propriétaire afrikaner, à la mémoire de sa femme, de ses deux filles et de son fils nouveau-né, morts dans les camps de concentration d'Aliwal", ajoute Michiel, comme en passant. 

Déjà, dans "L'Odeur des pommes", Mark Behr excellait à tresser son récit de différents courants de mémoire. Dans "Les Rois du Paradis", ce qui met en branle ce ballet des souvenirs, obscurs et bouleversants, c'est la mère, figure rayonnante, ouverte aux autres. Contrairement à son époux, désormais veuf mais toujours acariâtre et d'un conservatisme extrême, Beth Steyn, morte d'une crise cardiaque, était membre du Comité féminin de l'Eglise anglicane et sympathisante du Congrès national africain (ANC). C'est elle, au fond, qui permet, après de longues années d'absence, le retour du fils, "le petit dernier par qui était arrivée l'infamie", comme le narrateur lui-même se décrit. 

A l'occasion de l'enterrement, Michiel renoue avec les siens. Ces retrouvailles réveillent des douleurs intimes, des rancoeurs familiales qui, tel un miroir déformant, reflètent les divisions d'un pays en pleine mutation. Les déboires de Michiel ne sont rien, comparés au drame de son frère aîné, Piet, homosexuel non assumé, dont la mort hante à jamais la famille Steyn et ses silences. Les hommes ont rarement le beau rôle dans ce roman à multiples tiroirs. Ce sont les femmes, telle Lerato, fille de domestique devenue, à la force du poignet, cadre supérieure dans une société internationale, ou Karien, le premier amour de Michiel, qui incarnent cette Afrique du Sud en marche. Les Rois du Paradis s'achève en 2001, le 11 septembre précisément, comme pour chasser au loin, au coeur de l'Occident, le souffle de la tragédie. 

Délicat, généreux, foisonnant, le deuxième roman de Mark Behr fait écho, à sa manière, à l'oeuvre inachevée de l'écrivain Kabelo Sello Duiker, natif de Soweto, suicidé en 2005, qui avait abordé, lui aussi, la question de l'homosexualité, notamment dans The Quiet Violence of Dreams ("La tranquille violence des rêves", Kwela Books, 2001, non traduit). Michiel, le héros de Mark Behr, quitte la scène autrement : ce "bourgeois émigré", devenu un "bobo américain", n'est pas revenu en Afrique du Sud en acteur, "mais en spectateur, en figurant". Il en repart, grandi et blessé à la fois - sans happy end ni arc-en-ciel. A l'image du nouveau siècle. 

Les Rois du Paradis (Kings of the Water), de Mark Behr, traduit de l'anglais (Afrique du Sud) par Dominique Defert, JC Lattès

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